Sommaire de décision réglementaire portant sur Givlaari

Décisions d'examen

Le sommaire de décision réglementaire explique la décision de Santé Canada face au produit pour lequel une autorisation de mise en marché est demandée. Le sommaire de décision réglementaire comporte le but de la présentation et le motif de la décision.


Type de produit:

Médicament

Ingrédient(s) médicinal(aux):

Givosiran

Classe thérapeutique :

Autres produits du tube digestif et du métabolisme

Type de présentation :

Présentation prioritaire de drogue nouvelle (nouvelle substance active)

Numéro de contrôle :

237194
Quel était l'objet de la présentation?

Cette présentation de drogue nouvelle (PDN) a été déposée pour obtenir une autorisation de mise en marché du Givlaari pour le traitement de la porphyrie hépatique aiguë (PHA) chez les adultes.

Cette PDN a été examinée conformément à la Politique sur lévaluation prioritaire des présentations de drogues de Santé Canada.

Pourquoi la décision a-t-elle été rendue?

La porphyrie hépatiques aiguë (PHA) est une maladie rare qui résulte de défauts dans la voie de biosynthèse de lhème dues à des déficits denzymes menant à linduction de la synthase-1 (ALAS1) de lacide aminolévulinique (ALA). Ceci provoque laccumulation dans le foie de substances neurotoxiques, en particulier lacide delta ALA et le porphobilinogène (PBG). Ces substances neurotoxiques de lhème provoquent des symptômes tels que des crises neuro-viscérales aiguës qui se manifestent sous forme de douleurs abdominales sévères, une faiblesse musculaire, des crises épileptiques, un dysfonctionnement psychiatrique, des dommages neurologiques irréversibles, une hyponatrémie et de fréquentes visites médicales. La porphyrie aiguë intermittente est la forme la plus courante des PHAs et représente environ 80 % des cas symptomatiques.

Le seul traitement actuellement ciblé pour la PHA approuvé sur le marché est lhémine par intraveineuse dérivée des globules rouges. Lhémine est utilisée pour interrompre les attaques de la PHA et a été utilisée en clinique pour la prophylaxie de la PHA chez les patients qui ont des attaques aiguës temporaires liées au cycle menstruel, lorsque la thérapie aux glucides est inadéquate. Les liquides intraveineux, les analgésiques (opioïdes et non opioïdes), les modifications du régime alimentaire et le fait déviter les déclencheurs font partie de la base du traitement chez ces patients. Jusquau développement du Givlaari (givosiran), lhémine a été le seul traitement ciblé et comporte des risques à long terme de surcharge en fer. Les autres traitements contre la PHA comprennent la ménopause induite chimiquement avec thérapie hormonale suppressive (p. ex., agonistes hormonaux libérant la gonadotrophine). Chez les patients souffrant dinsuffisance hépatique, la greffe du foie est le seul autre traitement disponible.  

Le Givlaari est un petit acide ribonucléique (ARN) interférent synthétisé et modifié chimiquement qui se lie à une séquence génétiquement conservée dans lARN messager (ARNm) de lALAS1 dans le foie. Le Givosiran est administré par voie sous-cutanée et est administré au foie par absorption par les récepteurs de lasialoglycoprotéine (ASGPR). Le Givlaari inhibe la synthèse dALAS1 dans le foie par le mécanisme de linterférence ARN, ce qui entraîne une réduction substantielle et soutenue de lALA et du porphobilinogen (PBG).

Le promoteur a présenté létude pivot de phase III (ENVISION), un essai randomisé, à double insu, contrôlé contre placebo et multicentrique. Les patients ont été randomisés 1:1 (givosiran 2,5 mg/kg par rapport à un placebo) sur une période de 6 mois dans létude à double insu. Létude a recruté 94 adultes; 46 patients ont été affectés par randomisation au placebo et 48 au givosiran. Les résultats de létude ont révélé une diminution statistiquement significative du composite taux dattaque annualisé (TAA) moyen, qui était également importante sur le plan clinique et qui a produit des réductions importantes et constantes dans les trois composantes du composite TAA (hospitalisation, visite des soins durgence, utilisation de lhémine par intraveineuse). Au cours de la période à double insu de 6 mois, le TAA moyen était de 3,2 (intervalle de confiance (IC) à 95 %, 2,3-4,6) chez ceux qui recevaient le givosiran et de 12,5 (IC à 95 %, 9,4-16,8) pour le groupe placebo. Cela représente un TAA de 73 % inférieur chez tous les sous-types de PHA du groupe recevant le givosiran (p<0,001). Létude était suffisamment dynamique et a montré des résultats cohérents dans la majorité des sous-analyses et de multiples résultats secondaires favorisant le Givlaari plutôt que le placebo. Parmi les critères dévaluation secondaires présentant des avantages statistiquement significatifs en faveur de Givlaari figuraient le nombre moyen de jours annualisés dutilisation de lhémine par voie intraveineuse, la réduction des taux dacide delta-aminolévulinique (ALA) et de PBG et la réduction des pires degrés de douleur quotidienne. 

Parmi les autres mesures de résultats de santé rapportés par les patients (PROM) évaluées comme critères secondaires, il y avait le changement par rapport au niveau initial du score du sommaire de la composante physique (SCP) du formulaire abrégé à 12 questions de lEnquête sur la santé (SF-12) version 2. En ce qui concerne le SF-12, les résultats dans toutes les dimensions liées au fonctionnement physique ont montré un effet constant favorisant le givosiran par rapport au placebo. Les plus grandes différences observées sont les douleurs corporelles, le fonctionnement social et la limitation des rôles due aux problèmes physiques. Ce sont tous des résultats importants axés sur le patient.  

Les patients qui participaient à létude ENVISION ont été autorisés à poursuivre lessai dextension en mode libre qui se poursuivra pendant 29 mois (la collecte de données complètes nétait pas disponible au moment de cette présentation). Les patients du groupe placebo de létude ENVISION ont été autorisés à passer au givosiran 2,5 mg/kg chaque mois et les patients qui prenaient le givosiran 2,5 mg chaque mois ont été autorisés à réduire leur dose à 1,25 mg/kg à la suite délévations des transaminases. Les résultats préliminaires de lessai dextension concordent avec les résultats de létude pivot ENVISION et démontre un bénéfice à la continuation du traitement au givosiran.

Les effets indésirables les plus fréquemment signalés dans le groupe recevant du givosiran par rapport au groupe placebo étaient les réactions au point dinjection, les nausées, la dysfonction hépatique (augmentation de lalanine aminotransférase [ALT]), les maladies rénales chroniques, la diminution de la filtration glomérulaire estimée et les éruptions cutanées. Deux événements indésirables graves signalés chez au moins deux patients aggravaient la maladie rénale chronique et un patient a interrompu le traitement en raison dune limite supérieure de 8 fois la normale pour lALT. Au cours des études de la phase 1/2, un cas danaphylaxie a été signalé dans létude 002 et ce patient a été traité adéquatement et retiré de létude. Un autre patient a développé des anticorps anti-médicament dans le programme de développement et a été retiré de létude. 

Les risques liés au Givlaari sont compliqués par les comorbidités observées chez les patients atteints de PHA, notamment les maladies rénales chroniques et la dysfonction hépatique comme séquelles à long terme. Dans les études cliniques, il semble que ces problèmes aient été exacerbés par le traitement au Givlaari. La durée du suivi de six mois au cours de la période à double insu est relativement courte pour une maladie chronique à vie; par conséquent, un plan de gestion des risques (PGR) permettra de continuer à surveiller les patients afin de déceler les problèmes de sécurité potentiels et les événements indésirables qui pourraient se produire de nouveau ou persister plus longtemps que la période pendant laquelle létude a été menée. De plus, les données sur les patients pédiatriques et les adultes âgés de 65 ans et plus étaient absentes de la présentation. Les populations adultes et les données pharmacocinétiques suggèrent que lâge nest pas une covariable significative dans la pharmacocinétique du givosiran. Étant donné que la PHA est une maladie qui dure toute la vie, Santé Canada a jugé pertinent de suivre un plus grand échantillon de patients pendant une plus longue période pour autoriser une indication chez les adolescents. Aucun patient pédiatrique na été inscrit à une étape quelconque du programme de développement ou détudes clés en raison de la faible fréquence des attaques et de la rareté de cette affection dans la tranche dâge pédiatrique. Au moment de la présentation, les risques et les incertitudes du traitement, jumelés au manque de données pédiatriques, ne fournissaient pas suffisamment de preuves pour appuyer une indication chez les adolescents. Dans lensemble, le suivi plutôt court et la petite taille de léchantillon soulèvent certaines incertitudes quant à lobservation de tous les effets secondaires potentiels du traitement dans le cadre de létude. De plus, les données sur les patients présentant divers stades de déficience rénale ou hépatique sont absentes ou très limitées. 

Tout en tenant compte des risques et des incertitudes, des thérapies ciblées sont nécessaires pour les patients atteints de PHA. Compte tenu des options de traitement limitées, les avantages statistiquement et cliniquement significatifs du traitement au Givlaari observés dans létude pivot sont favorables. Le traitement sous-cutané peut être plus pratique et constitue une option efficace pour les patients atteints de PHA. Le traitement a le potentiel de réduire ou de remplacer une proportion de ladministration dhémine par voie intraveineuse. La réduction du besoin de cathéters veineux centraux est un avantage important, de même que la réduction de la douleur qui pourrait entraîner une réduction de lutilisation danalgésiques opioïdes. La collecte et lanalyse de données à long terme seront nécessaires avec le PGR pour mieux caractériser les effets à court et à long terme liés au Givlaari.  

Lefficacité clinique du Givlaari a été démontrée sur les plans pharmacodynamique et clinique grâce à des réductions importantes de la fréquence des attaques graves de porphyrie. Cette réduction de la fréquence des attaques aura probablement une incidence importante sur la qualité de vie des patients. Le profil dinnocuité global du givosiran est considéré comme acceptable et le risque est géré par le PGR proposé et la monographie du produit. Compte tenu de la nature de la maladie et de la rareté des traitements ciblés approuvés, les avantages cliniques du Givlaari lemportent sur les risques actuellement connus et associés à son utilisation. Leffet à long terme du traitement et de la sécurité chez les patients atteints de PHA continuera dêtre évalué davantage.

Le programme de pharmacologie clinique contenait des biomarqueurs, de la pharmacocinétique, de la pharmacodynamique et des études de titrage de dose pour évaluer linjection sous-cutanée de 2,5 mg/kg de givosiran une fois par mois chez des volontaires en bonne santé et chez des patients atteints de PHA.

Lexamen des données non cliniques na révélé aucun danger particulier pour les humains. Les données cliniques ont montré que le givosiran était rapidement absorbé dans le plasma, principalement distribué au foie et métabolisé en oligonucléotides plus courts par des nucléases. Seulement 14 % de la dose de givosiran a été récupérée dans lurine et le médicament doit être utilisé avec prudence chez les patients qui ont une déficience rénale grave. Aucun ajustement de dose nest nécessaire pour les patients atteints dune déficience rénale légère, modérée ou sévère ou dune déficience hépatique légère. Leffet du givosiran sur les patients atteints dune maladie terminale ou dune déficience hépatique modérée ou grave est inconnu.

Des réductions maximales des niveaux dALA et de PBG ont été obtenues au troisième mois avec le givosiran 2,5 mg/kg une fois par mois chez les patients atteints de PHA. Daprès ces biomarqueurs et les données de modélisation de la réduction de lALA dans lurine et les taux dattaque annualisés de la porphyrie, il a été démontré que la dose mensuelle de 2,5 mg/kg du givosiran est nettement meilleure que la dose trimestrielle ou le placebo du givosiran (2,9 attaques par année, 4,2 attaques par année et 12,5 attaques, respectivement).

Compte tenu de ses mécanismes daction, le givosiran peut réduire les taux dhème hépatique et pourrait réduire lactivité des protéines hémodépendantes dans le foie, comme les enzymes métabolisant le cytochrome P450 (CYP450). Lexamen des données a montré que le traitement au givosiran avait un impact important sur certaines enzymes CYP450. Il sagit dun aspect important, car la thérapie multimédicaments est courante chez les patients atteints de PHA en raison de comorbidités multiples, comme la douleur chronique, la dépression et lhypertension. Par conséquent, les patients doivent éviter lutilisation concomitante de givosiran avec des substrats CYP1A2 ou CYP2D6. Si lutilisation concomitante ne peut être évitée, il faudra surveiller les patients plus fréquemment pour déterminer si un ajustement de dose du médicament concomitant est nécessaire.

Alnylam Pharmaceuticals a présenté un PGR à Santé Canada pour le Givlaari. Après examen, le PGR a été jugé acceptable. Le PGR est conçu pour décrire les problèmes de sécurité connus et potentiels, pour présenter le plan de surveillance et, au besoin, pour décrire les mesures qui seront mises en place pour réduire au minimum les risques associés au produit.

Dans lensemble, Givlaari présente un profil avantages-risques-incertitudes favorable pour le traitement des adultes atteints de porphyrie hépatique aiguë sous la supervision de médecins qualifiés.

Décision rendue

Approuvée; émis un avis de conformité conformément au Règlement sur les aliments et drogues a été délivré