Sommaire de décision réglementaire portant sur Sholyne
Décisions d'examen
Le sommaire de décision réglementaire explique la décision de Santé Canada face au produit pour lequel une autorisation de mise en marché est demandée. Le sommaire de décision réglementaire comporte le but de la présentation et le motif de la décision.
Type de produit:
Ingrédient(s) médicinal(aux):
Classe thérapeutique :
Type de présentation :
Numéro de contrôle :
Quel était l'objet de la présentation?
Cette présentation de drogue nouvelle (PDN) a été déposée afin d’obtenir l’autorisation de mise en marché de Sholyne (cevimeline) pour le traitement des symptômes de la sécheresse buccale chez les patients atteints du syndrome de Sjögren. Il s’agit d’une présentation de médicament fondés sur des données de tierces parties. Un avis de non-conformité (ANC) a été émis en juin 2021 en raison de l’insuffisance des données fournies par le promoteur pour établir un profil avantages-effets-incertitude favorable. Le promoteur a soumis une réponse à l’ANC le 28 septembre 2021. Une lettre de retrait à la suite à un avis de non-conformité (ANC-R) a été recommandé et émis le 6 avril 2022. Une demande de réexamen a été reçue le 29 juin 2022. La décision de réexamen a été transmise au promoteur le 12 septembre 2022. La décision ANC-R a été maintenue avec quelques modifications aux principales objections.
Pourquoi la décision a-t-elle été rendue?
La présentation de Sholyne par voie orale pour le traitement des symptômes de la sécheresse buccale chez les patients atteints du syndrome de Sjögren était fondée sur trois études : l’étude SB95US01 (rapportée par Fife et coll.), une étude randomisée de six semaines à double insu de phase 2, comparant la cevimeline 30 milligrammes (mg), 60 mg et un placebo chez 75 sujets, deux études pivots de phase 3 de 12 semaines, soit l’étude SB96US02 (rapportée par Petrone et coll.) et l’étude SB96US04, comparant la cevimeline 15 mg, 30 mg et le placebo chez 197 et 212 sujets, respectivement.
Il y avait peu de données dans les études toxicologiques pour permettre une comparaison fondée sur l’exposition. Dans les études non-cliniques, Sholyne n’a eu aucun effet sur la fertilité chez les mâles et une légère diminution de l’implantation chez les femelles, et l’administration pendant la grossesse n’a été associée à aucun effet sur le développement fœtal.
Une évaluation cardiovasculaire approfondie, conforme à l’International Council on Harmonisation (ICH) S7, aurait dû être fournie, étant donné que Sholyne agit par l’intermédiaire de récepteurs qui sont exprimés sur le tissu cardiaque. Dans la réponse à l’ANC (R/ANC), le promoteur a proposé des considérations fondées sur l’ensemble des données cliniques, des modifications à la monographie de produit canadienne et un engagement à effectuer un test hERG in vitro après l’approbation. En fin de compte, les données fournies n’appuyaient pas cette réponse.
Il y a eu une augmentation statistiquement significative des adénocarcinomes utérins chez les rattes, bien que le ratio d’exposition proposé n’ait pu être confirmé, car l’exposition humaine fournie par le promoteur ne correspond pas au ratio fourni. L’approche du promoteur visant à confirmer l’exposition chez les humains dans la R/ANC n’est pas satisfaisante. Par conséquent, l’absence de données sur l’exposition humaine obtenues par des méthodes bioanalytiques et avec du plasma humain ne permet pas de confirmer les ratios d’exposition proposés dans la monographie de produit.
L’étude SB95US01 présentait deux paramètres co-primaires. L’efficacité du premier paramètre co-primaire, l’évaluation globale subjective de la sécheresse buccale à six semaines, avec une réponse « meilleure », était de 35 %, 76 % et 67 % pour le placebo, la cevimeline 30 mg et la cevimeline 60 mg, respectivement (p = 0,004). Le résultat n’était pas significativement meilleur lorsqu’on comparait les deux groupes qui ont reçu la cevimeline avec le groupe qui a reçu le placebo pour l’autre paramètre co-primaire, l’évaluation subjective de six symptômes de sécheresse buccale sur une échelle visuelle analogique. D’après ces résultats, seule l’évaluation globale de la sécheresse buccale a été maintenue comme paramètre primaire d’efficacité pour les études de phase 3, et la dose de 60 mg, qui n’a pas donné lieu à une meilleure efficacité, a été exclue des études ultérieures.
L’étude SB96US02 a atteint la signification statistique du paramètre primaire d’efficacité, car une réponse « meilleure » a été obtenue chez 37 %, 45 % et 66 % des sujets du groupe placebo, cevimeline 15 mg et cevimeline 30 mg, respectivement, p = 0,0007.
Dans la plus grande étude de phase 3, l’étude SB96US04, aucun des résultats n’était statistiquement significatif. Une réponse « meilleure » a été obtenue chez 55 %, 36 % et 53 % des sujets du groupe qui a reçu le placebo et la cevimeline 15 mg et la cevimeline 30 mg, respectivement, p = 0,889). Selon le promoteur, aucune explication concrète autre que le hasard ne peut expliquer le manque d’efficacité par rapport au placebo pour les deux doses de cevimeline, et la réponse au placebo plus élevée s’explique par la variabilité et l’incertitude aléatoires. Les facteurs qui peuvent influencer la réponse au placebo présentée dans la R/ANC s’appliqueraient également aux groupes qui ont reçu la cevimeline. Par conséquent, ces facteurs ne peuvent être responsables du manque d’efficacité observé pour deux doses différentes de cevimeline comparativement au placebo. La R/ANC n’a pas confirmé l’efficacité.
L’échec à démontrer l’efficacité de la cevimeline par rapport au placebo dans l’étude pivot (SB96US04) n’est pas seulement attribuable à une réponse élevée au placebo, comme l’avance le promoteur, mais à une efficacité plus faible observée avec la cevimeline que dans les études SB96US02 et SB95US01. Cette question n’a pas été traitée adéquatement dans la R/ANC.
Le manque d’efficacité est corroboré par le fait qu’aucun des autres paramètres subjectifs n’était significatif pour la cevimeline par rapport au placebo dans aucune des études, y compris l’évaluation des symptômes de sécheresse buccale cotés sur une échelle visuelle analogique, un paramètre co-primaire dans l’étude de phase 2 SB95US01. Les sujets ayant rapporté une amélioration des évaluations globales n’ont pas rapporté de meilleurs résultats meilleurs pour ce paramètre lorsque l’on compare l’un ou l’autre des groupes qui a reçu l’ingrédient actif avec les groupes qui ont reçu le placebo. Le défaut d’obtenir des résultats significatifs pour ce paramètre dans toutes les études n’a pas été traité adéquatement dans la R/ANC.
En raison de l’incapacité de l’étude pivot de phase 3 SB96US04 à démontrer l’efficacité, l’étude de phase 2 SB95US01 a été classée comme étude pivot. Cette dernière ne peut remplacer l’étude pivot de phase 3 qui a échoué en raison de sa durée plus courte, du petit nombre de sujets traités (vingt-cinq patients sous cevimeline à 30 mg) et des résultats mitigés quant aux mesures des résultats co-primaires. Bien qu’elle ait été déposée à titre d’étude à l’appui, l’étude SB96US04 est considérée comme étude pivot dans l’évaluation globale de Sholyne.
Le paramètre secondaire de l’altération du débit salivaire par rapport au niveau de référence ne peut être utilisé comme preuve confirmative de l’efficacité ou comme substitut au paramètre primaire prédéterminé qui lui n’a pas atteint son seuil de signification. La différence de débit salivaire entre la cevimeline 30 mg et le placebo dans l’étude SB95US01 était minime, et de meilleurs résultats sont liés à la dose de 60 mg. Ces résultats ne concordent pas avec les résultats du paramètre primaire subjectif, qui était une réponse « meilleure » à la dose inférieure. La différence de débit salivaire était également plus faible entre les groupes dans l’étude SB96US02, et des résultats similaires ont été obtenus avec la cevimeline 30 mg et le placebo dans l’étude SB96US04. Selon le promoteur, les mesures du débit salivaire montrent une variabilité et une incertitude élevées, supérieures à la dose de 30 mg. L’étude SB96US02 ne peut être utilisée comme preuve primaire ou confirmative d’efficacité dans le contexte de l’échec de l’étude pivot SB96US04.
De plus, l’efficacité non concluante est étayée par l’absence de réponse posologique cohérente. Une réponse « meilleure » a été signalée chez un plus grand nombre de sujets recevant 30 mg de cevimeline dans l’étude SB95US01, sans amélioration significative dans le groupe de 60 mg par rapport au placebo. La diminution de l’efficacité à la dose la plus élevée n’est pas considérée comme un indicateur d’un plateau, comme le mentionne le promoteur dans la R/ANR, car l’efficacité ne se stabilise pas à 30 mg, mais diminue, et cette diminution est plus susceptible d’indiquer des résultats erronés et un manque d’efficacité par rapport au placebo.
Les comparaisons entre les études présentées dans la R/ANR n’offrent pas de preuves solides ou confirmatives de l’efficacité, ni compensent le manque d’efficacité démontré dans l’étude SB96US04. Une analyse dose-réponse inter-études présentée dans la R/ANR n’est pas aussi robuste et fiable que la comparaison des doses dans la même étude, qui a montré une absence de dose-réponse.
Par conséquent, les explications fournies dans la R/ANR ne répondaient pas de façon satisfaisante aux préoccupations soulevées pendant l’examen et ne confirmaient pas l’efficacité.
Bon nombre des événements indésirables (EI) les plus courants reflètent l’activité muscarinique du médicament. Les EI les plus courants signalés dans les études auprès de patients atteints du syndrome de Sjögren qui prenaient de la cevimeline étaient la transpiration excessive, les nausées et la diarrhée. Deux cas d’infarctus du myocarde ont été signalés dans les études comme étant possiblement liés à la cevimeline et l’innocuité cardiovasculaire n’a pas été suffisamment démontrée. Comme l’a déclaré le promoteur, l’association d’événements cardiovasculaires graves avec l’utilisation de la cevimeline ne peut être exclue. Dans la R/ANR, le promoteur reconnaît les risques de prolongation de l’intervalle QT et de torsades de pointes, signalés relativement à l’utilisation de la cevimeline. Le promoteur a proposé d’ajouter cette mise en garde dans la monographie de produit. Toutefois, cette atténuation des risques n’est pas jugée adéquate pour un médicament sans preuve substantielle d’efficacité pour le traitement de la sécheresse buccale.
Selon le promoteur, aucune étude pharmacocinétique, d’innocuité ou d’efficacité n’a été relevée sur les interactions médicamenteuses ou chez les patients atteints d’insuffisance hépatique ou rénale, des affections qui pourraient mener à une clairance réduite ou retardée et à une augmentation des concentrations plasmatiques de Sholyne. Par conséquent, l’innocuité et l’efficacité cliniques n’ont pas été adéquatement démontrées chez ces patients. L’information fournie dans la R/ANR au sujet de d’autres médicaments qui présentent des mécanismes de clairance similaires dans le but d’évaluer les changements à l’exposition attribuables à une insuffisance hépatique ou rénale, à une néphropathie terminale et aux interactions médicamenteuses, ne fournit qu’une estimation théorique des risques. Les mises en garde et les contre-indications proposées pour l’utilisation dans la R/ANR peuvent mentionner l’absence de données, mais des données cliniques dans la population cible seraient plus exactes et préférables.
Dans l’ensemble, le manque de données probantes à l’appui de l’efficacité de la cevimeline par rapport au placebo, les résultats inconséquents sur des paramètres subjectifs et l’absence d’une relation dose-réponse indiquent un manque global d’efficacité. Les explications fournies dans la R/ANR ne répondent pas suffisamment aux préoccupations soulevées au cours de l’examen et ne confirment pas l’efficacité. Les seuils d’innocuité, y compris les risques cardiovasculaires potentiels, les données limitées sur les interactions médicamenteuses et l’utilisation chez les patients atteints d’insuffisance rénale ou hépatique, ont été reconnus dans la R/ANC. L’étiquetage proposé ne répond pas adéquatement à ces préoccupations d’innocuité, surtout dans le contexte où il n’y a pas de preuves substantielles de l’efficacité du traitement de la sécheresse buccale chez les patients atteints du syndrome de Sjögren.
Un profil avantages-effets-incertitude défavorable est maintenu pour l’utilisation de Sholyne pour l’indication proposée.
Décision rendue
Rejetée; une lettre de retrait à la suite un avis de non-conformité (ANC-R) a été délivré conformément au Règlement sur les aliments et drogues.